2 avril 2015

Recherche d’emploi: le pouvoir du Capital Social

Remarque préliminaire
Ces dernières années, les chiffres témoignent de l’évolution du PIB en Afrique Subsaharienne. D’ailleurs, selon les tenants de la croissance, une forte variation positive du PIB d’un pays se conjugue nécessairement avec créations d’emplois ceteris paribus. Ce qui n’est absolument pas le cas de la région subsaharienne. En effet, partout dans ces pays dotés d’une bonne croissance économique, des jeunes fraîchement diplômées battent le pavé sans trouver d’emplois qualifiés. Il convient donc de remarquer que la croissance économique ne fait pas recette du moins dans la réduction de la pauvreté et du chômage. Ce qui d’ailleurs, fait dire au plus iconoclastes des théoriciens, qu’un ingrédient aurait été oublié dans la quête du développement économique. Ce remède selon eux, consisterait à puiser dans le social pour parfaire l’économique. Il s’agirait du Social Capital (ou Capital Social en français).

Quid du Social Capital ?
Dans le cadre de ce billet, je le définirais en faisant référence au stock de relations sociales accumulés par l’Homoeconomicus (Id. l’agent économique) tout au long de sa vie. De manière plus épurée, pour l’individu, avoir du capital social, c’est détenir un réseau important de relations sociales qui peut lui être profitable. La recherche d’emplois par un jeune diplômé est ici, l’exemple adéquat pour mettre en lumière, l’importance du « Social Capital ». Il est indéniable qu’aujourd’hui, sur le marché du travail, persiste un chômage involontaire des jeunes. Dorénavant, il ne suffit pas ou (plus) d’être méga-diplômes ou de sortir de grandes écoles pour trouver instantanément un emploi sur mesure. Plusieurs autres facteurs rentrent indéniablement en compte nonobstant notre bagage académique. Tel que l’échec du système de prix à permettre un équilibre entre offre et demande d’emploi : l’offre d’emploi est toujours inférieure à la demande. Là où le marché a échoué, le capital social de l’individu peut y remédier.

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On l’explique par le cas de Pascal, notre jeune diplômé…
Pascal cherche du travail et en plus il est doté de bonnes compétences. C’est d’un naturel enthousiaste et optimiste que Pascal passe par le marché du travail pour trouver son bonheur. Après maints tentatives, force est de constater que Pascal n’est pas l’élu : la compétitivité fait rage sur le marché de travail. Beaucoup d’appelés peu d’élus (ils sont nombreux les jeunes diplômés compétents à l’image de Pascal). Après avoir essuyé plusieurs échecs en une année, Pascal n’en démords pas. Dans un pub (bar) du coin, Pascal rencontre ce jeune homme à fière allure, un ancien camarade de l’université (avec qui, il est resté en bons termes après la faculté). Ce dernier travaille aujourd’hui, dans une PME locale. Autour d’un verre, les deux amis discutent du bon vieux temps. Pascal fait part de sa situation à son bon ami. Ce dernier lui suggère de postuler dans son entreprise qui, est en train de recruter beaucoup de jeunes à la compétence de Pascal. Une lueur d’espoir pour Pascal. Il remercie son ami du tuyau. Notre jeune demandeur d’emploi postule dès le lendemain et il est appelé une semaine plus tard, pour un entretien et finit par décrocher un contrat de travail à durée indéterminée. Comme beaucoup de personnes, Pascal a tout simplement utiliser son capital social pour trouver un emploi. Le capital social de Pascal est constitué de ses anciens camarades de l’université, de ses proches amis, de ses voisins ou de sa famille.

Avec le capital social, tout est question de « réseau »…
En effet, le réseau de relations sociales détenu par un individu peut influer sur la dynamique de sa recherche d’emploi. A posteriori, l’existence de « bonnes » relations peut être un atout crucial pour un agent économique en quête d’opportunité d’emploi (à l’image de Pascal). Faut-il encore pour lui, savoir déceler les bonnes relations « Bonding » des moins bonnes « Bridging ». Et seul la confiance « Trust » permet de discerner le vrai du faux dans ses relations. Dans une optique différente, je dirais que de nos jours, l’agent économique n’a plus la plus patiente d’attendre que le marché du travail s’équilibre par l’aide d’une quelconque main invisible (ou visible). Autrement, il n’est plus rentable pour l’individu compétent d’attendre qu’une offre d’emploi corresponde à sa demande d’emploi (ou l’inverse). L’individu (le demandeur d’emploi) crée lui-même sa propre offre (J.M. Keynes). Cela se matérialise par l’aptitude à l’autoentrepreneuriat des jeunes diplômés africains. Pas d’emplois, alors ils créent leurs propres entreprises et deviennent de facto, autoentrepreneurs. Mais quel rapport avec le Social Capital ? Me diriez-vous ?

Réseaux sociaux professionnels et opportunité d’emploi…
Notre période est caractérisée par l’émergence des nouveaux médias et de l’ économie du partage bousculant ainsi les traditions. Désormais, ces jeunes autoentrepreneurs du continent s’organisent en réseau professionnel virtuel dont le but est le partage d’information et d’opinion. Au sein de ses groupes de relations sociales, se concentrent des professionnels, des jeunes travailleurs, des diplômés en recherche d’emploi, des jeunes talentueux… Ces réseaux constituent une forme d’entre-aide dans la recherche d’emploi. Même virtuelle, les relations sociales sur le Web peuvent être considérées comme du Social Capital dans la mesure où elles constituent une plus-value économique pour ces membres. Cependant, sur l’efficacité de ces réseaux à permettre à l’un de ces membres de décrocher un emploi, je dirai que tout est une question de confiance sociale, d’altruisme, de coopération mutuelle et de transmission de l’information. J’insiste sur ce dernier point : l’information.

L’information cachée, une entrave au capital social
Il est communément admis en économie que la recherche d’information est coûteuse. Ceci est d’autant plus vrai que dans les relations entre agents économiques, il faut à tout prix éviter, ce que les économistes comme J. Stiglitz ou G . Akerlof appellent l’asymétrie d’information (ou information cachée). Exemple d’un membre du réseau qui détient une rente informationnelle : information utile et pertinente sur une opportunité d’emploi sur le continent mais se refuse à le communiquer à tout le réseau mais uniquement à un membre de celui-ci (du fait de leur liens ethniques, de parenté ou encore de proximité). Cela constitue une entrave aux règles qui régissent le fonctionnement même du réseau à savoir la transparence de l’information. Cette forme de non coopération pose un problème de pérennité et de viabilité de ces réseaux professionnels. En cela, le capital social ou le réseau de relations entre personnes n’est plus considéré comme une plus-value économique du fait de la capture de l’information et ne peut donc permettre le développement économique.

Le capital social, chaînon manquant dans les stratégies de développement ?
Oui, le capital social est un actif du développement. Ce sont les économistes du développement tels que Partha Dasgupta qui le professent. Pour ce dernier, le capital social (les réseaux) sont complémentaires au marché. Le seul inconvénient imputable est la capture de l’information sur les opportunités d’emplois par un même réseau. Par conséquent, le développement économique peut être lent dans la mesure où les opportunités d’emploi ne bénéficie qu’à un groupe créant ainsi des inégalités. En guise de conclusion, l’on retiendra que si, il est convenablement entretenu, le capital social peut être d’une utilité positive pour un individu en recherche d’un emploi.

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Commentaires

Jean michel
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Article instructif!

Senioriales
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Il est malheureux les autres blogs n’écrivent pas d’aussi bon articles

Josette NIANKOYE
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Un Merci tardif @JeanMichel @Senioriales !