Josette NIANKOYE

Que font les femmes au Parlement ?

Ainsi bredouillait mon oncle lors de la dernière rencontre familiale. Pourquoi cette interrogation si lapidaire ? Ne vous inquiétez pas. Je vous dis tout. Voyez-vous cher(e)s lecteur(ice)s, mon oncle c’est ce monsieur qui ne peut ni être tenu en fin philosophe, ni en fin politologue. Tout de même, il se voudrait le détenteur du savoir.  

Crédit photo : Fadumo Dayib
Crédit photo : Fadumo Dayib

La politique, l’apanage des femmes ?

Comme à l’accoutumée, je retrouve la famille, le temps d’une pause dominicale. Cet après-midi, mon oncle et moi échangions à propos de la politique africaine. En l’occurrence, de la prolifération des candidatures féminines dans les instances élues. C’est donc avec aménité que j’appréciai la candidature à la tête de la Somalie, de Madame Fadumo Dayib. Je trouvais que cette dame incarnait un parangon d’authenticité. Volontaire et engagée, son élection à la présidence insufflerait une dynamique nouvelle à cette Somalie patriarcale. J’étais fière de voir cette génération de femmes africaines, afficher leur ambition (parfois démesurée). Poursuivant l’éloge dithyrambique de la candidate somalienne, je m’étonnais en même temps de la sous-représentation des femmes au Parlement. Tout naturellement, je décidais de poser un regard bien critique sur ma Guinée natale.

Dans un pays où les femmes représentent la moitié de la population, pourquoi ne constituent-elles pas le quart des élus au Parlement ? Le quota législativement fixé étant de 30% des femmes guinéennes pouvant être à la chambre des députés. Ce que je trouve absurde soit dit en passant. Si les femmes souhaitent se faire entendre à travers un scrutin. Grand bien leur fasse. Pourquoi les en priver ? En Guinée, notons que 23,8% des femmes sont membres du gouvernement (soit 7 femmes sur 33 ministres) et seulement 0,08% occupent les fonctions de gouverneur de région.  Comment expliquer cette faible présence féminine en politique ? Où sont passées ces braves femmes guinéennes ? déplorais-je.

« À leur place ! Grommela mon oncle. Ces bonnes femmes ont justement compris où se trouvait leur place. Et ce n’est certainement pas au sein de l’hémicycle. Mais d’ailleurs, que feront-elles au Parlement ? Quel rôle pourraient-elles prétendre jouer dans cet antre de loups ? Dans ce cancan ? finit-il par me lancer d’un ton circonspect. Rassurez-vous cher(e)s lecteur(ice)s, la désinvolture de mon oncle ne me surprenait guère. Néanmoins, il n’était pas le seul à le penser. Peu savent réellement les fonctions de la femme parlementaire. Et souvent, cette dernière ignore elle-même, le pouvoir qu’elle détient en siégeant à l’Assemblée nationale ou au sénat.

Crédit photo : Guinéenews
Crédit photo : Guinéenews

Quelles prérogatives pour une élue parlementaire ?

Comme le savez probablement, le Parlement est un espace de pouvoir, de réflexion et de décision. Les élus au Parlement votent des lois qui touchent entre autres, le champ du social pour ne citer que celui-ci. Sans les femmes au Parlement, la question féminine aurait peu d’intérêt. En effet, des lois seront votées sans pour autant qu’elles puissent bénéficier pleinement aux femmes. Et pourtant, qui d’autres qu‘elles, peut le mieux cerner avec précision leur besoin quotidien ? En siégeant au sein de l’hémicycle, les élues deviennent les porte-parole des sans voix. Connaissant parfaitement les revendications de leurs congénères, les femmes parlementaires adopteront des positions défendant le bien-être des femmes.

Par ailleurs, une femme parlementaire a des prérogatives importantes lui permettant d’influencer les décisions. Elle participe au débat parlementaire, s’engage au sein des commissions et le plus important, elle initie des textes de loi ambitieux prenant en compte les soucis des minorités. Ces textes seront d’abord examinés, votés puis adoptés et enfin promulgués. Il peut s’agir d’une loi permettant à la veuve marginalisée dans l’accès à l’héritage d’obtenir gain de cause, d’une loi attribuant à la femme agricultrice des droits sur cette parcelle de terre. Ou encore d’un texte de loi protégeant les filles des mariages précoces et des mutilations génitales

En revanche, j’insiste sur un point capital, la présence féminine à la chambre basse n’est certainement pas la solution idoine des discriminations que peuvent subir les femmes dans nos sociétés africaines. Pour que les actions des élues ne soient pas insignifiantes, les lois doivent être convenablement appliquées. Cette efficacité découlera d’un contrôle strict dans leur exécution. Et là encore, le rôle des élues sera non négligeable. Pour qu’un texte de loi, sanctionnant par exemple les violences sexuelles, soit strictement appliqué, elles devront s’il le faut, se constituer en groupes de pression pour interpeller le gouvernement et insister auprès des services publics. Non, les femmes parlementaires ne font pas de la figuration pour satisfaire une certaine parité. Au contraire, elles constituent des actrices à part entière dans la promotion des droits des femmes et des enfants.

Femmes parlementaires -Classement Afrique
Femmes parlementaires -Classement Afrique

Le Rwanda ou le leadership politique au féminin

Sur le continent (et pas que), seul le Rwanda peut se targuer d’une bonne représentativité des femmes dans les instances parlementaires (figure ci-dessus). Encore le Rwanda vous me direz. Oui ! Toujours le Rwanda. Outre son système éducatif très exemplaire (taux de scolarisation avoisinant 100%), le Rwanda a su instaurer au fil des années, une vraie culture de la parité au sein de ses institutions. La proportion des femmes à la chambre des députés est de 64%, et 39% pour le sénat. Et pour parfaire le tout, une femme est à la tête de la présidence du parlementQuoi qu’il en soit, il est évident que cette supériorité féminine n’est pas du tout anodine. Si le Rwanda a eu la hardiesse de miser sur la parité, c’est qu’il a tout intérêt à le faire. Et c’est tout à son honneur. 

Le fait est qu’aujourd’hui, que ce soit dans les postes ministériels, au sein du parlement, ou sur la table de négociation dans les accords de paix et de sécurité, les femmes ont tout à fait leur place dans ces instances décisionnelles. D’aucuns diront que c’est une exigence démocratique. Certes, pour moi, il s’agit plutôt des prémices du développement humain d’une nation. Toutefois, il revient aux femmes d’être audacieuses, d’oser bousculer les codes pour construire un vivier politique. Se présenter aux élections communales, municipales ou dans les autres instances élues de la localité sera toujours un premier pas vers une citoyenneté politique.

À la question : que font les femmes au Parlement ? Ma verve a su convaincre mon oncle qui fut outre mesure surpris.

 


Kahloucha, Ghuira : quid du racisme en Tunisie ?


« Kahloucha », « Ghira », ou le racisme tunisien

« Racisme », « xénophobie » ,  « kahloucha », « Ghira » : des mots qui ne me parlaient pas jusqu’au jour où j’ai foulé le sol tunisien. Le 21 mars célèbre chaque année la lutte pour l’élimination de la discrimination raciale. Pour célébrer ce jour j’ai décidé d’écrire un billet qui me ramène quelques années en arrière, en Tunisie. C’est dans ce pays où je me rendais en tant qu’étudiante que, pour la première fois, le racisme s’est imposé à moi. Le racisme pas seulement comme une évidence, mais surtout comme une réalité, une expérience vécue.

Je suis guinéenne, d’autres disent « noire » ou « africaine »…  je suis arrivée en Tunisie pour quatre années d’études, quatre années de ma vie dans un pays qui parle des  « africains » comme s’il s’agissait d’un continent complètement étranger ! La Tunisie ne se revendique pas de l’Afrique, son africanité semble être totalement inconsciente, les noirs y sont traités d’esclaves ou de nègres, au féminin ça donne des termes péjoratifs comme « kahloucha » ou « Ghira ».
Tunisie, je t’aime et je ne t’oublierai jamais, mais voilà, c’est sur ton sol que j’ai connu le racisme.
Tunisie, je t’aime et je ne t’oublierai jamais, mais je vais quand même écrire ce billet pour  raconter quelques –unes de mes tristes expériences d’étudiante guinéenne en Tunisie.

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(Main dans la main. Crédit France 24)

Aéroport de Tunis
Nous étions une bande de sept étudiants guinéens et nous venions poursuivre des études supérieures en Tunisie. Ce jour-là, assommés par le vol, nous ne souhaitions qu’une chose : rentrer, dormir et nous réveiller en forme le lendemain pour aller voir l’avenue Bourguiba – les Champs Elysée Tunisiens ! –  dont on avait tant entendu parler. Mais c’était sans compter sur le traitement exclusif que nous réservait la police des frontières à l’aéroport.

A la sortie de l’avion, notre groupe a été mis à part. Le motif ? Nous venions d’Afrique noire, cela suffisait à nous séquestrer le temps d’un contrôle d’identité particulier. Les autres passagers du vol (à première vue des africains du nord) n’ont eu aucun problème à passer le filet de sécurité. Notre guide consulaire est rapidement arrivé, mais, même en brandissant tous nos papiers en règle, les policiers se montraient hermétiques à toute issue favorable. On se serait crus tels des voleurs pris la main dans le sac. Ils attendaient le prochain vol pour nous rapatrier illico ! Finalement,  quatre heures après, dépités et abasourdis,  nous sortions enfin de l’aéroport.

Premier jour à la Faculté
Mon professeur tunisien d’éco-gestion m’interpella devant tout l’amphithéâtre en me lançant  effrontément : « Hey Kahloucha » (nègre), il me montrait du doigt sans vergogne, « comment es-tu arrivée en Tunisie ?  Attends !  Je le sais …  par la nage, comme vous tous ! ». Je me suis raidie intérieurement. J’étais sidérée, je n’arrivais pas à croire qu’un professeur puisse sortir de telles absurdités. Ma seule réponse fut mon sourire benoît, mais au fond de moi je fulminais.

Les rues de Sfax
Le racisme, c’est aussi ces moments où, quand mes amies et moi-même nous nous promenions dans les rues de Sfax, des enfants, encouragés par leurs parents, scandaient derrière nous « Ghira, Ghira, rentrez chez vous ». Entendez « Ghira » comme nègre et esclave.

Le  taxi véhément
Le racisme, c’est encore quand, à l’arrivée d’un trajet en taxi, le conducteur triple sans scrupules  le compteur du taximètre. J’ai eu beau crier au scandale et demander pour quelles raison cette attitude, le monsieur tout grassouillet avec le visage buriné par le soleil m’a regardé droit dans les yeux et m’a répondu avec assurance « Tu n’es pas contente ?  Tu n’avais qu’à pas venir en Tunisie. Il fallait rester chez toi ! C’est tout, voilà  Kahloucha ! Et maintenant « atini flous » (file le flouze).

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(Visage et continent africain. Crédit France 24)

Eh oui… les actes racistes foisonnent en Tunisie, j’en ai malheureusement fait l’expérience et tous les étudiants étrangers qui y ont séjourné vous diront la même chose que moi. De la Tunisie à la France j’ai connu tant d’actes racistes qu’aujourd’hui  j’en rigole.
Pourquoi ? Parce-que je pense que les personnes racistes souffrent d’une chose dont elles sont esclaves : leur ignorance. Cette absence totale de tolérance vis-à-vis des autres a pour origine ce que j’appelle  « notre dictateur intérieur ». Notre vie est dirigée par un dictateur, autoritaire et ignorant. Ce dictateur qui nous dirige ce sont nos croyances, nos illusions. Certaines d’entre elles nous rendent idiots et gâchent nos vies : la méconnaissance du monde qui nous entoure et nos croyances sur les autres. Méconnaissance et croyances sont en effet  le terreau du racisme, c’est là que ce phénomène prend vie et s’enracine.
Le racisme se traduit surtout par la promotion et la montée de la méchanceté sociale. Il faudrait inventer une manière de vivre ensemble dont les bases ne seraient pas d’être contre tout ce qui ne nous ressemble pas, de ne pas être contre tout ce qui nous est inconnu, étranger.


Un RDV inattendu avec Chimamanda !

D’aucuns d’entre vous ont toujours rêvé de rencontrer leur modèle, cette personne qui vous fascine et vous influence positivement dans votre vie. Je l’appellerai mon inspiration : celle qui a réveillé la part de féminisme qui a longtemps sommeillé en moi.

Chimamanda Ngozi Adichie
Chimamanda Ngozi Adichie

Elle, c’est *Chimamanda Adichie ! Il y a quelques jours, j’avais RDV avec elle au 37 Quai Branly.

Tout commence quand cette alerte d’un évènement titré « Les débats du Monde Afrique à Paris : les femmes, avenir du continent africain » se glissa sournoisement dans ma boîte mail. Encore, un de ces éternels débats sur l’Afrique disais-je soliloquant. Curieuse, je survolais avec une légère appréhension le contenu du programme. C’est alors que mon attention se porta sur : 14h25 conversation avec Chimamanda Adichie. Ce nom avait un écho tout particulier en moi. Surprise, étonnée, je restais là prise d’une soudaine catalepsie. Quoi !? Chimamanda à Paris en même temps que moi. Impossible pour moi de ne pas aller la voir. Non, je ne manquerais en aucun cas ce RDV volé.

#LMAParis2016
#LMAParis2016

Après avoir déplacé quelques montagnes, ce mardi 14h tapant, je me retrouvais là assise dans cette salle tamisée du 37 Quai Branly. En attendant Chimamanda, le temps me parut une éternité même bercée par la voix douce de la chanteuse camerounaise Patricia Essong.

Patricia Essong entourée de sa troupe
Patricia Essong #LMAParis2016

14h30 : elle était là, faisant son entrée sous les acclamations d’une foule d’admirateur. Ce que j’ai vécu à ce moment, était au-delà de la compréhension. L’instant était parfait. C’est le seul mot qui me vient à l’esprit. Rien à ajouter à cette perfection sans la détériorer, s’en s’éloigner et finalement la perdre.

La conversation avec la journaliste du Monde, Sylvie Kauffmann commenca enfin. Elle porta sur des sujets divers et variés. Sur Formation de Béyoncé, sur les cheveux de Michelle Obama, sur la présidentielle aux USA. J’avoue que j’ai été un tantinet déçu par la tournure de la conversation qui s’éloignait de l’essence même de la rencontre. Il a fallu attendre la séance des questions de l’auditoire pour que je retrouve la Chimamanda volubile et loquace.

Deux personnes du public m’ont littéralement séduit. Ce jeune homme comorien qui demandait à Chimamanda quels conseils pouvait-elle donner à cette nouvelle génération de filles. Attention, je le cite : « Chez nous, aux Comores, on ne naît pas Hommes, on le devient. Et ce sont les femmes africaines qui contribuent elles-mêmes à entretenir la domination des hommes sur elles. » (Vous aurez compris le clin d’œil à Simone de Beauvoir).

© Stephan Gladieu / Banque mondiale

Ou de cette jeune fille très déterminée qui argua avec une fierté contagieuse : « Je ne comprends pas pourquoi tout le monde pense que le féminisme africain vient du féminisme occidental. Ceux qui pensent cela, oublient une chose : l’histoire africaine a été marqué par des femmes très combattives qui ont fait la fierté du continent. Je parle de nos reines, de nos amazones ou de nos résistantes. Pour moi, l’Afrique a une leçon de féminisme à donner à l’Occident. » Applaudissements ! Clap ! Clap ! Clap !

Les amazones du Dahomey
Les amazones du Dahomey

Voilà ! Conversation avec Chimamanda terminée ! Je retiendrais d’elle, outre sa grâce naturelle, sa voix à la fois douce et imposante, ces quelques bribes de mots : « La prise de pouvoir par les femmes n’est pas quelque chose d’ordinaire. Il faut la revendiquer à tout prix pour changer la donne. L’égalité de genre est un débat en cours. Avec l’implication des hommes, on peut arriver au gender equality. On peut être féministe et porter du rouge à lèvres, mettre des talons aiguilles et s’amuser. »

Kelly Rowland
Kelly Rowland

Sur ce, l’écrivaine s’engouffra vers la porte de sortie. Et moi, je restais là, assise, silencieuse, triste de ne pas avoir eu mon selfie avec elle. Pourquoi d’ailleurs ? Je me le suis demandée ! Par peur surement, de me faire rembarrer. Il faut raison garder, Chimamada est une star.

Ruminant mon échec cuisant, j’allais me diriger vers la sortie, lorsque soudain, je fus attirée par ces portraits de femmes africaines exposés le long du mur. Des femmes autonomes dont le courage et la résilience transperçaient la photographie. Elles venaient du Niger, Togo, Bénin, Ouganda, Éthiopie et avaient été immortalisé par le photographe Stéphane Gladieu qui dit d’elles : « qu’elles sont la plus grande richesse du continent, son avenir. »

© Stephan Gladieu / Banque mondiale
© Stephan Gladieu / Banque mondiale

C’est comme en apesanteur, que je quittais donc le 37 Quai Branly. Et comme pour réenchanter l’instant, je marchais le long du pont Alma respirant l’air frais de ce mardi soir. Il est inutile de vous dire qu’à ce moment précis, un bonheur indescriptible irradiait en moi. J’avais vu Chimamanda et j’allais enfin le barrer de ma wishlist. Quoique, je me promets de la revoir et cette fois-ci, en aparté. Une promesse que je glanais timidement sous le regard bienveillant de la lune naissante.

*En savoir plus, lire : Chimamanda Ngozi Adichie : « Nigériane, féministe, noire, Igbo et plus encore »


L’Afrique, les femmes et la COP21 !

Ici, ce n’est pas Kyoto, c’est Paris ! C’est là que se déroule depuis moins d’une semaine, la conférence sur le climat : la COP21. Une grand-messe à laquelle les gros pollueurs de la planète, les pollués et les « autres » sont obligés d’assister. Faut dire que l’enjeu est planétaire : trouver fissa, un accord bénéfique pour le climat. 

Jusque-là, tout va bien ! Je ne dirais pas dans le « meilleur des mondes. » Car c’est sans compter sur la marée noire des critiques pessimistes et des théories subversives qui pèsent sur l’issue de la COP21. Fallait s’y attendre quand même.

1 Heart 1 Three, un projet pour la COP21
1 Heart 1 Three, un projet pour la COP21

Par ailleurs, s’il y a bien une qui ne compte pas rester en marge de la COP21, quitte à taper du poing sur la table. C’est bien l’Afrique. Et oui, le continent fait parler de lui. L’Afrique compte bien remporter le premier tour de sa partie de poker « environnemental ».

En effet, les pays représentés n’excluent pas de monter au front pour obtenir des financements afin de faire face aux défis climatiques du continent. Ça parle d’un coût du changement climatique de 16 milliards de dollars pour l’Afrique. Ok ! Stay tuned.

Autre chose à relever sur la COP21, point de féminisme ici, je vous le dis d’emblée. Mais juste un détail rédhibitoire (enfin pour ma part) : le contraste entre l’imposante présence des hommes du climat et la discrétion des femmes. Jdcjdr !

Photo officielle de la COP21
Photo officielle de la COP21

Cependant, même moyennement représentées, les femmes sont également assises autour des tables des négociations de la COP21. Les « Climate Warriors » les surnomme-t-on. Au nombre de 13, elles comptent chacune marquer d’une estampille, les discussions sur les enjeux climatiques.

Qu’elles viennent du Sri Lanka (Achala Abeysinghe), Costa Rica (Christiana Figueres), Nigéria (Priscilla Achakpa), Pérou (Farhana Yamin), des Îles Marshall (Kathy Jetnil-Kijiner), de New York (Elizabeth Yeampierre) ou du Tchad, la COP21 prend une autre dimension avec elles. Leur portrait ici Climate Warriors by VOGUE.

Hindou Oumarou Ibrahim
Hindou Oumarou Ibrahim

Parmi ces femmes, on retrouve la Tchadienne Hindou Oumarou Ibrahim, coordinatrice des femmes autochtones du Tchad (AFPAT). On s’en doute bien que pour cette activiste, la COP21 n’est pas qu’une simple partie de Poker où pollueurs et pollués essayent de tenter un coup de bluff.

Loin de là, l’enjeu est essentiellement vital. « Pour nous, il n’est pas question de réglementation, c’est une question de survie. Si les femmes se réunissent, elles peuvent avoir plus d’impact sur les négociations. Parce que nous savons que l’avenir ça vient de nous. »

A ce propos, vous n’êtes pas sans savoir que la région du lac Tchad en Afrique est en proie depuis quelques années, à une désertification galopante. N’en parlons pas du ravage du réchauffement climatique sur les populations.

Une COP21 déterminante ? Encore, faut-il que l’homélie des prêcheurs du climat soit entendue au sortir de la grand-messe…

 


A Paris, les tontines sont africaines

C’est en assistant dimanche, à une tontine de femmes dans les quartiers peuplés de Paris que l’idée m’est venue de gribouiller ces quelques mots. En effet, cela fait belle lurette que les tontines existent surtout en Afrique où elles sont largement reconnues comme « la banque des femmes ». Répandue aussi bien dans les zones urbaines que rurales d’Afrique, on assiste désormais à une exportation de cette pratique loin des frontières africaines. A vrai dire, ces dernières années, force est de constater que les associations tontinières ont le vent en poupe à Panam (Paris). Bien qu’un regroupement de femmes d’origine africaine, les tontines se substituent intégralement à  l’épargne bancaire.

Une tontine! C’est quoi?

Partout en Afrique, dans les pays comme le Bénin, le Cameroun, le Congo, la raison d’être de ces associations féminines était la défense de leurs intérêts, une sorte de solidarité féminine, d’entraide basée sur la confiance mutuelle. Face à la pauvreté, à la conjoncture économique et aux difficultés du secteur formel (la banque) à octroyer des crédits, l’idée est venue aux femmes de se constituer en association rotative d’épargne (système informel). Explicitement, la tontine est une association d’individus unis en fonction de leurs liens amicaux, familiaux, de leur appartenance à une même profession, un même quartier et qui se regroupent (mensuellement par exemple) afin de mettre en commun leur épargne pour résoudre des problèmes personnels ou collectifs.

Le fonctionnement est simple…

 Au départ, ces femmes décident d’un commun accord du montant fixe à verser pour la cotisation mensuelle. Et sous forme de tirage au sort mensuel, le bénéficiaire de la somme totale est connu. Il s’ensuit donc un système rotatif jusqu’à ce que le dernier membre reçoive cette somme. Une fois que, toutes les participantes ont reçu leur part, le cycle recommence par un autre tirage au sort. Sous forme de contrat social, la tontine est régie par des règles propres et strictes, applicables aux membres. Pour garantir le respect des versements, des amendes sont infligées en cas de retard de paiement. Un trésorier est choisi parmi les membres pour tenir la comptabilité de l’association. Comme avantage, ces épargnes ont permis aux femmes de subvenir aux besoins de leur foyer, de financer les études de leur progéniture et même d’organiser leur mariage.

 Justine, l’une des bénéficiaires de ces tontines me raconte son histoire…

A Paris, les femmes qui intègrent ces associations financières ont des objectifs louables : investir dans leurs pays respectifs entre autres. Hier, j’ai accompagné ma tante à l’une des réunions mensuelles de sa tontine. Profitant agréablement de cette rencontre inopinée, je suis donc allée de ma petite interrogation. La rencontre se passait chez l’une d’entre elles dans le 18e arrondissement de Paris. Au total, 15 femmes provenant toutes de la Guinée et âgées de 25 à 40 ans. J’y ai rencontré Justine, la benjamine de ce groupes. Arrivée à Paris comme étudiante, il y a de cela huit ans, Justine en plus de ses cours à l’université, multiplie des jobs étudiants depuis six ans. Elle gagne environ 1 000 € par mois. Justine habite chez sa tante, c’est elle qui lui a soumis l’idée d’intégrer sa tontine comme la 15e personne. Justine ne regrette pas. Investir 200e de sa paie mensuelle ne lui a donné que des avantages financiers. Chaque mois, il lui suffit de ponctionner cette somme de sa petite épargne bancaire, de l’injecter dans l’association et attendre sagement son tour au tirage au sort mensuel afin de recevoir ses 3 000 €.  Avec ce pécule et en plus de son salaire, elle est arrivée à ouvrir un petit commerce à Macenta (ville guinéenne). Une boutique de vente de vêtements pour jeunes filles assez rentable qu’elle a confiée à sa grande sœur. Chose faite, elle a désormais comme projet l’achat d’un lopin de terre en vue d’une construction dans son pays. Comme à l’accoutumée, Justine attendra son tour. Ambitieuse et consciente qu’il lui faudra encore deux années ou plus pour réaliser son projet, la jeune femme n’en démord pas.

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Une perception erronée des tontines…

Personnellement, je me suis complètement fourvoyée sur le but de ces tontines. A l’époque, quand j’étais adolescente, j’abhorrais ces groupements de femmes dont ma mère prenait part les dimanches. Quand son tour venait et qu’elle accueillait  la  fête de sa tontine dans notre cour, je n’y voyais que du feu. En effet, j’ai toujours cru que cette réunion de grandes femmes ne servait entre autres qu’à piailler et à préparer des cérémonies inutiles. Je n’avais jamais imaginé qu’elles en tiraient des profits financiers. Aujourd’hui, connaissant le fonctionnement de ces tontines et la sécurité financière qu’elles représentent pour les femmes des pays en développement, je plussoie l’idée même de ces regroupements. Outre le gage financier qu’elles assurent, les associations tontinières sont devenues au fil du temps une sorte de capital social. Ces femmes sont unies entre elles selon le principe de confiance « trust ». Si jamais, une de ces femmes et sa famille faisaient face à quelques imprévus financiers, les membres de la tontine avancerait son tour pour qu’elle puisse bénéficier de la somme due ou allaient jusqu’à côtiser pour l’aider.

Les tontines profitent au développement!

A l’issue de la réunion, j’ai demandé à ma tante si, elles avaient, outre leurs objectifs personnels, des projets communs pour la Guinée. Oui, argua-t-elle. Elles ont pour projet de se constituer en ONG pour défendre une cause qui leur tient à cœur. Elles ne m’en ont pas dit plus…À suivre ! Pour finir, la vulgarisation des associations tontinières au sein de la communauté africaine de Paris et même de Bruxelles est dans une certaine mesure, un outil de développement pour le continent. Car, les sommes d’argent épargné par ces femmes sont le plus souvent destinées à être réinvesties dans leurs pays d’origine.


Recherche d’emploi: le pouvoir du Capital Social

Remarque préliminaire
Ces dernières années, les chiffres témoignent de l’évolution du PIB en Afrique Subsaharienne. D’ailleurs, selon les tenants de la croissance, une forte variation positive du PIB d’un pays se conjugue nécessairement avec créations d’emplois ceteris paribus. Ce qui n’est absolument pas le cas de la région subsaharienne. En effet, partout dans ces pays dotés d’une bonne croissance économique, des jeunes fraîchement diplômées battent le pavé sans trouver d’emplois qualifiés. Il convient donc de remarquer que la croissance économique ne fait pas recette du moins dans la réduction de la pauvreté et du chômage. Ce qui d’ailleurs, fait dire au plus iconoclastes des théoriciens, qu’un ingrédient aurait été oublié dans la quête du développement économique. Ce remède selon eux, consisterait à puiser dans le social pour parfaire l’économique. Il s’agirait du Social Capital (ou Capital Social en français).

Quid du Social Capital ?
Dans le cadre de ce billet, je le définirais en faisant référence au stock de relations sociales accumulés par l’Homoeconomicus (Id. l’agent économique) tout au long de sa vie. De manière plus épurée, pour l’individu, avoir du capital social, c’est détenir un réseau important de relations sociales qui peut lui être profitable. La recherche d’emplois par un jeune diplômé est ici, l’exemple adéquat pour mettre en lumière, l’importance du « Social Capital ». Il est indéniable qu’aujourd’hui, sur le marché du travail, persiste un chômage involontaire des jeunes. Dorénavant, il ne suffit pas ou (plus) d’être méga-diplômes ou de sortir de grandes écoles pour trouver instantanément un emploi sur mesure. Plusieurs autres facteurs rentrent indéniablement en compte nonobstant notre bagage académique. Tel que l’échec du système de prix à permettre un équilibre entre offre et demande d’emploi : l’offre d’emploi est toujours inférieure à la demande. Là où le marché a échoué, le capital social de l’individu peut y remédier.

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On l’explique par le cas de Pascal, notre jeune diplômé…
Pascal cherche du travail et en plus il est doté de bonnes compétences. C’est d’un naturel enthousiaste et optimiste que Pascal passe par le marché du travail pour trouver son bonheur. Après maints tentatives, force est de constater que Pascal n’est pas l’élu : la compétitivité fait rage sur le marché de travail. Beaucoup d’appelés peu d’élus (ils sont nombreux les jeunes diplômés compétents à l’image de Pascal). Après avoir essuyé plusieurs échecs en une année, Pascal n’en démords pas. Dans un pub (bar) du coin, Pascal rencontre ce jeune homme à fière allure, un ancien camarade de l’université (avec qui, il est resté en bons termes après la faculté). Ce dernier travaille aujourd’hui, dans une PME locale. Autour d’un verre, les deux amis discutent du bon vieux temps. Pascal fait part de sa situation à son bon ami. Ce dernier lui suggère de postuler dans son entreprise qui, est en train de recruter beaucoup de jeunes à la compétence de Pascal. Une lueur d’espoir pour Pascal. Il remercie son ami du tuyau. Notre jeune demandeur d’emploi postule dès le lendemain et il est appelé une semaine plus tard, pour un entretien et finit par décrocher un contrat de travail à durée indéterminée. Comme beaucoup de personnes, Pascal a tout simplement utiliser son capital social pour trouver un emploi. Le capital social de Pascal est constitué de ses anciens camarades de l’université, de ses proches amis, de ses voisins ou de sa famille.

Avec le capital social, tout est question de « réseau »…
En effet, le réseau de relations sociales détenu par un individu peut influer sur la dynamique de sa recherche d’emploi. A posteriori, l’existence de « bonnes » relations peut être un atout crucial pour un agent économique en quête d’opportunité d’emploi (à l’image de Pascal). Faut-il encore pour lui, savoir déceler les bonnes relations « Bonding » des moins bonnes « Bridging ». Et seul la confiance « Trust » permet de discerner le vrai du faux dans ses relations. Dans une optique différente, je dirais que de nos jours, l’agent économique n’a plus la plus patiente d’attendre que le marché du travail s’équilibre par l’aide d’une quelconque main invisible (ou visible). Autrement, il n’est plus rentable pour l’individu compétent d’attendre qu’une offre d’emploi corresponde à sa demande d’emploi (ou l’inverse). L’individu (le demandeur d’emploi) crée lui-même sa propre offre (J.M. Keynes). Cela se matérialise par l’aptitude à l’autoentrepreneuriat des jeunes diplômés africains. Pas d’emplois, alors ils créent leurs propres entreprises et deviennent de facto, autoentrepreneurs. Mais quel rapport avec le Social Capital ? Me diriez-vous ?

Réseaux sociaux professionnels et opportunité d’emploi…
Notre période est caractérisée par l’émergence des nouveaux médias et de l’ économie du partage bousculant ainsi les traditions. Désormais, ces jeunes autoentrepreneurs du continent s’organisent en réseau professionnel virtuel dont le but est le partage d’information et d’opinion. Au sein de ses groupes de relations sociales, se concentrent des professionnels, des jeunes travailleurs, des diplômés en recherche d’emploi, des jeunes talentueux… Ces réseaux constituent une forme d’entre-aide dans la recherche d’emploi. Même virtuelle, les relations sociales sur le Web peuvent être considérées comme du Social Capital dans la mesure où elles constituent une plus-value économique pour ces membres. Cependant, sur l’efficacité de ces réseaux à permettre à l’un de ces membres de décrocher un emploi, je dirai que tout est une question de confiance sociale, d’altruisme, de coopération mutuelle et de transmission de l’information. J’insiste sur ce dernier point : l’information.

L’information cachée, une entrave au capital social
Il est communément admis en économie que la recherche d’information est coûteuse. Ceci est d’autant plus vrai que dans les relations entre agents économiques, il faut à tout prix éviter, ce que les économistes comme J. Stiglitz ou G . Akerlof appellent l’asymétrie d’information (ou information cachée). Exemple d’un membre du réseau qui détient une rente informationnelle : information utile et pertinente sur une opportunité d’emploi sur le continent mais se refuse à le communiquer à tout le réseau mais uniquement à un membre de celui-ci (du fait de leur liens ethniques, de parenté ou encore de proximité). Cela constitue une entrave aux règles qui régissent le fonctionnement même du réseau à savoir la transparence de l’information. Cette forme de non coopération pose un problème de pérennité et de viabilité de ces réseaux professionnels. En cela, le capital social ou le réseau de relations entre personnes n’est plus considéré comme une plus-value économique du fait de la capture de l’information et ne peut donc permettre le développement économique.

Le capital social, chaînon manquant dans les stratégies de développement ?
Oui, le capital social est un actif du développement. Ce sont les économistes du développement tels que Partha Dasgupta qui le professent. Pour ce dernier, le capital social (les réseaux) sont complémentaires au marché. Le seul inconvénient imputable est la capture de l’information sur les opportunités d’emplois par un même réseau. Par conséquent, le développement économique peut être lent dans la mesure où les opportunités d’emploi ne bénéficie qu’à un groupe créant ainsi des inégalités. En guise de conclusion, l’on retiendra que si, il est convenablement entretenu, le capital social peut être d’une utilité positive pour un individu en recherche d’un emploi.


Éloge de la Femme Africaine

Adama Paris NDiaye, Styliste sénégalaise
Adama Paris NDiaye, Styliste sénégalaise

Comme disait un philosophe connu, les femmes si elles réussissent bouleverseront la planète tout entière. C’est le cas actuellement des femmes africaines.
Aujourd’hui, la voix de l’Africaine est devenue prépondérante. Hier encore, celles qui étaient traitées de pusillanimes par les biens pensants, prennent désormais leur destin en main. Encouragées par la recrudescence du mouvement féministe et la lutte contre l’égalité des sexes, elles renversent pacifiquement l’ordre établi par la société et brisent au fur et à mesure le plafond de verre dans le milieu professionnel. 

Apte à l’action et animée d’une force téméraire, les femmes africaines font fi du sexisme ambulant et apprivoisent les métiers pourtant réservés aux hommes: métiers des Mines, métiers de l’ICT4D (Technologie de l’Information et de la communication pour le développement), Politiciennes, Parlementaires, Journalistes, Femmes d’Affaires, Femmes de culture pour ne citer que ceux-ci. Le leitmotiv de l’intellectuelle africaine n’est pas d’évincer l’homme d’emblée mais de participer au même titre que lui, à la vie économique, politique et sociale. Loin des clichés et des préjugés, les africaines font bouger le continent. Nombreuses sont celles qui aujourd’hui, constituent des porte-étendards d’une Afrique qui avance positivement. 

La sénégalaise Mariéme Jamme, Femme d'Affaires
La sénégalaise Mariéme Jamme, Femme d’Affaires

Qui s’en souvient de l’épidémie Ebola ? Pas plus tard qu’hier, les chiffres officiels de l’OMS montraient une baisse des contaminations et de la mortalité due au virus. Grâce à qui, me direz-vous ? A dire vrai, l’effort, le pouvoir de sensibilisation et la mobilisation de femmes africaines ont permis d’éradiquer peu à peu la maladie. Qu’elles soient bénévoles, infirmières ou médecins, les femmes des différents pays touchés par Ebola jouent un rôle non négligeable dans cette grande lutte. A l’image de ces femmes guinéennes de la ville de Kankan qui, ont eu la finesse d’esprit de fabriquer des savons contre Ebola. Des savons servant à se laver les mains instantanément et revendus à moindre prix pour être accessibles à toutes les couches de la population. En cette journée internationale des droits des femmes, mon coup de cœur tend donc spécialement vers ces femmes qui œuvrent sans relâche pour faire de leur pays un endroit sain pour ces enfants.

Des femmes distribuent du Savon contre Ebola dans les marchés. Photo PNUD Guinée
Des femmes distribuent du Savon contre Ebola dans les marchés. Photo PNUD Guinée

De nos jours, quand on fait allusion aux Africaines entreprenantes : Empowerment ou Autonomisation, est l’unique mot à la mode pour désigner leur ténacité. Les femmes africaines ont su entamer une crise d’autorité pour se défaire des contraintes de la société patriarcale. Nombreuses et persistantes sont leurs revendications quotidiennes : participation à la prise de décision du foyer, participer conjointement à l’éducation des enfants et surtout devenir des femmes africaines « breadwinners ». En effet, outre le mariage et l’enfantement, les femmes africaines en plus d’être des mothers Caretake (des femmes qui prennent soin de leur famille) veulent d’ores et déjà devenir des Breadwinner (des femmes qui travaillent et apportent de l’argent au foyer). Un rôle pourtant réservé à l’homme depuis des lustres.

Zenab Camara, Présidente et fondatrice de l'ONG Women in Mining Guinée
Zenab Camara, Présidente et fondatrice de l’ONG Women in Mining Guinée

Par ailleurs, si autonomisation et éducation des femmes sont inextricablement liées, le défi qui anime toutes les femmes entreprenantes du continent ne sera jamais relevé si l’éducation n’est pas pour tous : éducation pour les filles et garçons et de surcroît la parité. Car, malgré les actions entreprises en faveur de l’éducation des filles sur le continent, il y aura beaucoup de laissées pour compte dans l’accès à l’éducation. Environ 28 millions de filles ne seront jamais scolarisées et ne mettront sans doute jamais les pieds dans une classe (UNESCO, 2015). Chiffre alarmant car ces fillettes seront amenées à être des femmes de demain. Seule l’instruction scolaire est la clé leur permettant de s’échapper du cercle pernicieux de l’extrême pauvreté. Par conséquent, cette journée est opportune pour faire entendre les voix des jeunes filles invisibles et exclus de l’éducation.

Excellente journée à toutes les femmes du monde…


Confession intime d’une excisée

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Et pourtant, elle avait dit Non!
D’une voix stridente, elle avait crié
De sa petite force, elle s’était débattue
De toutes les larmes de son corps, elle avait pleuré
Avec ferveur, elle avait imploré les étoiles
Soumise à son impuissance, elle avait invoqué la bonté céleste
Face au malheur, elle s’était donc résignée.

Vie brisée, Liberté bafouée, Fille désabusée,
Perdue à jamais, elle était désormais,
Dans les abysses de l’enfer, elle s’était promenée,
Miséricorde divine l’avait quittée et Satan ne voulait guère d’elle.

Ô cauchemar ! Qui diable es-tu pour hanter ses nuits?
Hélas ! Cauchemar n’était point!
Dans les méandres du purgatoire, elle s’était réveillée,
Luttant contre sa Némésis.

Et pourtant, elle avait dit Non !
Mais inaudible était sa voix,
Sous la canicule, elle avait longtemps erré,
Le soleil, elle l’avait salué, mais celui-ci refusant de la brûler,
La pluie, elle l’avait impétueusement défiée,
mais ses fines gouttelettes faisaient mine de l’éviter.

Morte, elle se croyait, mais la faucheuse ne voulait guère l’emporter,
Vivre donc pour ressentir l’écorchure de ce jour,
Ô jour obscur, maudit es-tu !
Toi, le jour où ils décidèrent, faisant fi de son avis,
Atones seront donc ses plaies, honteuses seront donc ses cicatrices
Inaltérables, elle les porterait donc à jamais?
Et pourtant, elle avait dit Non !

Souviens-toi d’oublier, lui avait susurré une voix,
Passèrent les années, Sa destinée, elle l’avait acceptée,
Passions inassouvies, Ardente Concupiscence hélas guère d’extase,
Solitude, solitude ! Douce solitude, Toi qui subodore sa douleur
Que ferait-elle sans toi ?
Pour sonder ses blessures, elle se confie à toi,

Personne pour sauver son âme en peine,
Pis encore, personne pour la comprendre,
Ils ignorent tous que l’amertume
aime se complaire dans la solitude.
Et pourtant, elle avait dit non !

Elle, c’est l’excisée, Elle, c’est toutes les filles qui disent Non !
Non! Sans se faire entendre!
Elle, c’est toutes les filles qui ont séjourné en Enfer et qui y reviennent !
Non! À l’Excision des filles !
Non! À toutes formes de mutilations génitales féminines!


L’étrange missive du vieux Bamba

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Dans la petite ville de Sombory, la vie s’est arrêtée depuis la grave panne de la machine. En effet, l’usine qui faisait vivre les habitants, a cessé ses activités. Ces derniers accusent le coup et s’interrogent intérieurement: Qu’est-il arrivé à cette ville charmante et par dessus tout qu’ont-ils fait au bon Dieu pour mériter cette funeste situation?

Ce vendredi dès l’aurore, alors que les grisailles recouvraient encore un pan du ciel bleu, le vieux Bamba accueillait dans sa cour, les sages de Sombory. Mais que faisaient-ils là de sitôt, tous parés de « blanc immaculé ». En effet, comme chaque premier vendredi du mois et cela depuis plus de quatre ans, les sages de Sombory se réunissaient chez le plus ancien d’entre eux « le vieux Bamba » pour honorer le traditionnel sacrifice.

En raison de l’arrêt prématuré de l’usine et le chaos qu’il a engendré sur leur mode de vie, la population somborienne est persuadée qu’une malédiction a été lancé sur la ville. Quatre années de vaches maigres! Quatre années de malheur ont suffit à faire de Sombory, une « ville maudite ». Sinon, comment expliquer, ce noir total dans la ville et ce silence digne d’un cimetière ambulant? Sur la grande place du marché, les bonnes femmes et les marchands à la sauvette se le demandent perplexes.

Encore, ce matin-là, dans la cour du vieux Bamba, les commentaires foisonnaient à merveille. Pour les plus superstitieux, le tout puissant punit la population pour ses errements du passé. Hélas! La jeune population somborienne avait des années de mauvaises conduites derrière-elle estimaient les vieux sages. Pendant longtemps, la ville de Sombory avait fait florès dans cette petite contrée ouest-africain. L’afflux des touristes étrangers, les fêtes nocturnes, la prééminence des boites de nuit sur les lieux de culte, l’ivresse des samedis soirs, la perdition de la jeunesse… Et pour clore le tout, le succès de Sombory avait enhardi ses habitants qui, pensaient se suffire à eux-mêmes en méprisant les autres villes du pays. Fort malheureusement, ils avaient oubliés que « le mépris se ment à lui-même, quand il croit se suffire » soliloquait le vieillard.

Lassés de la tournure de la situation, les habitants bien qu’ insurgés contre les hauts dirigeants du pays, avaient plus que jamais remis leur sort à Dieu. Pendant des jours, des semaines, des mois, des années, ils avaient priés avec ferveur pour demander pardon au tout puissant. Dorénavant, les mosquées et les églises abondaient de personnes et surtout les jeunes, eux qui, autrefois, désertaient ces lieux sacrés.  Les sages quant-à eux, multipliaient les sacrifices: des moutons, des brebis, des vaches… Tout était opportun pour implorer la miséricorde divine afin de sauver Sombory.

Ce matin-là, encore, chez le vieux Bamba, on pouvait entendre dans la bouche des sages :Dieu est grand! Il ne laissera pas tomber ses fils. Nous n’avons plus d’eau potable et même plus d’électricité. Dire qu’il y a une vie à Sombory relève d’un euphémisme, arguait le vieux Bamba allongé dans son hamac.

Il n’avait pas tord le vieux. Il n’y avait plus de vie à Sombory. La grande faucheuse était passée par là et avait emportée avec elle, la plupart des anciens ouvriers et employés de l’usine. Pas plus tard qu’hier, on enterrait l’un d’entre eux: Moussa, le chaudronnier. Pour le vieux Bamba, ces derniers sont morts par chagrins et soucis car ce coma artificiel de l’usine et cette mort cérébrale de la ville, a anéanti leurs espoirs de gagner leur croûte. Ils étaient si jeunes regretta t-il amèrement. Comment ces jeunes femmes désormais sans époux et ces enfants sans père en l’occurrence sans héritage vont-ils subsister au quotidien ? Elles n’auront désormais que ce sourire factice pour se fondre dans la masse et continuer à vivre s’empressa de répondre un des sages.

Pendant ce temps, alors que le cocorico du coq retentissait dans la cour et annonçait le matin, le marchand de pain chaud ouvrait son commerce. Soudain, dans sa réflexion momentanée, le vieux Bamba se rappela, qu’il avait oublié de lire la missive qui lui était parvenue hier soir. Plongeant, sa main dans la poche droite de sa tunique blanche, il saisit délicatement l’enveloppe, l’ouvra et se mit à lire son contenu sans sourciller. Dans sa lecture, son expression du visage semblait se figer, on n’aurait dit qu’il venait d’apercevoir à la fois, l’ange Gabriel et l’ange de la mort. Achevant donc sa lecture, il remit avec soin la missive dans sa poche et scruta longuement le ciel bleu-gris.

Tous dans la cour, avaient les yeux fixés sur lui, tous même le coq qui avait arrêter de chanter. Sentant alors l’air lourd et les regards inquisiteurs, d’un bond non rassuré, il se leva et s’engouffra dans sa maison. Quelques secondes plus tard, le vieux Bamba en ressortait chapelet à la main. Et d’une voix indescriptible, il lança: « mes amis, prions; le dénouement est maintenant possible. Nos prières ont été exaucées. Dieu a enfin voulu dénouer le nœud qu’il avait noué. Oui, mes chers, la malédiction de Sombory est en fin arrivée à sa péripétie… »

Une histoire vraie.


Le vélo et son charme désuet dans ma contrée !

 

Le vélo en Guinée n’est pas roi comme dans d’autres contrées d’Afrique. Pour apporter une once de lumière sur l’utilisation du vélo dans mon pays, il faut en préliminaire, commencer par soi, se prendre pour point de départ, mais non pour but. Je me dois donc de vous conter mon expérience personnelle.

Tout commence dans cette belle cité des ingénieurs quelques parts en Guinée. Là-bas, les standings de vie des familles étaient différents les uns des autres. Ce qui faisait que les enfants de la cité n’avaient pas tous les mêmes chances de jouir pleinement du bonheur de posséder un deux-roues. En fait, la présence d’un vélo dans une famille lambda avait une connotation positive. Cela signifiait augmentation de revenus, changement de statut ou aisance matérielle. Dans ma cité, posséder donc un vélo (BMX ou VTT), à l’instar d’une voiture, relevait du privilège et appartenait uniquement aux nantis. Ainsi, un parent qui se hasardait à l’offrir à sa progéniture voulait le récompenser pour ses bonnes notes à l’école, pour sa bonne conduite ou en guise de cadeau d’anniversaire.

En ce qui me concerne, mon rapport au vélo a été une expérience aussi ludique que périlleuse. Je l’avoue ! J’ai toujours eu une peur bleue de monter à vélo. Autant je ne l’avais pas encore, autant je m’en méfiais diablement. Il faut dire que mon père y était pour quelque chose. Pour lui, l’usage du vélo est considéré comme quelque chose de masculin. « C’est pour les garçons, me disait-il, et toi, tu es une fille ». De son gré, les filles étaient trop fragiles pour conduire un vélo. Elles risqueraient de se faire mal, de se blesser et se faire des vilaines tâches.  Il me le rabâchait incessamment. Alors pas question de permettre cela. Paradoxalement, mes frères n’avaient que faire du vélo, ils préféraient passer leurs vacances à jouer au Nintendo ou au ballon.

Il m’a fallu donc attendre une éternité avant de goûter au plaisir que pouvait me procurer l’usage du vélo. Jusque-là, je me contentais du seul spectacle offert par les voisins. Assise sagement sur la terrasse de la maison familiale, le regard perdu dans ce décor pittoresque, je m’amusais et me délectais des nombreux aller-retours des voisins sur leurs vélos. Sur les pentes de la rue adjacente à nos maisons, mes copines et leurs frères roulaient à bride abattue sans se soucier de tomber. Je les enviais énormément et eux, ils me le rendaient si bien en me narguant amicalement par un coucou.

Qu’à cela ne tienne, mon supplice s’est arrêté un après-midi ensoleillé d’Août, quand ma mère en a eu marre de me trouver toujours assise sur le perron en train de scruter les voisins. Elle décida à l’insu de mon père que l’heure était enfin venue pour moi de connaître ma première expérience à vélo. Elle profita donc de son absence à l’étranger pour m’acheter un vélo. Le jour d’après, j’avais enfin mon nouveau joujou: un BMX tout flambant. J’allais enfin pouvoir rendre la pareille à mes amis en devenant actrice et non spectatrice de la magie enchantée des deux roues.

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En compagnie de mes frères, mon apprentissage a été rapide et efficace, j’étais fière de sortir enfin de l’enceinte de notre maison pour aller épater mes voisins. Ils étaient là, stupéfaits. C’était à leur tour de savourer mes prouesses. Un tour, deux , puis trois tours à vélo, je faisais déjà mes preuves. En revanche, l’enchantement n’a duré que quelques semaines avant que n’arrive le jour fatidique: ce moment où le charme du vélo se rompit irrémédiablement. Ce fut le jour où je tombai pour la première fois devant mes camarades et m’écorchait le front, le genou, le coude et la paume de la main. Le vélo, pour moi, s’était désormais fini. Pendant, un long moment, je n’y ai plus touché. Mon expérience avec le vélo a donc été placée sous le sceau d’une aventure dangereuse.

Par ailleurs, force est de constater que le vélo possède un autre aspect que celui, ludique, que les enfants comme moi lui ont prêté. En effet, l’usage du vélo comme activité ludique s’estompe petit à petit quand on se déplace de la ville vers les campagnes. Ainsi, analyser la place du vélo en Guinée revient à opposer la zone rurale et la zone urbaine. Dans les villages et les campagnes, la bicyclette comme on l’appelle là-bas, représente une nécessité vitale pour les habitants et elle est profondément ancrée dans une réalité de survie quotidienne.

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@UNESCO

Exemple du village de Sibata dans la région forestière de Guinée, où  le vélo est l’oxygène de vie des paysans. C’est lors de mes vacances à Sibata que j’ai compris ce qu’est réellement le vélo, et l’importance qu’il revêt pour les plus démunis. Je vous explique! C’était une de ces matinées fraîches, où les mangues trop mûres tombaient nonchalamment dans la cour de mon grand-père et où l’odeur des goyaves se faisait imposante, que je fus témoin d’un véritable film qui se déroulait devant mes yeux. L’histoire a eu lieu devant le puits du village et avec quatre acteurs principaux qui se servaient du vélo dans une logique de survie quotidienne.

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Le premier, un paysan sur sa bicyclette revenant de la chasse, son gibier accroché à un des roues, s’était arrêté pour remplir sa gourde d’eau et papoter avec ces bonnes femmes du matin. Il allait loin, au prochain village, pour rapporter le gibier à sa femme qui devrait en faire le repas de la journée. Peu après, je vis cet autre paysan à la fois pressé et inquiet, transportant sa femme enceinte au centre de santé du coin, sur une bicyclette d’infortune. Cette action paraissait banale pour les habitants du village alors que pour moi, elle était incroyable. Ensuite, une troisième personne: un jeune garçon âgé d’une dizaine d’années était sur le chemin de l’école du village qui se trouvait à 10 km. Il n’était pas seul. Il partageait la même bicyclette avec son jeune frère.

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Enfin, le film se terminait avec une femme bien âgée mais encore endurante. Cette dernière après avoir rempli ses bidons jaunes d’eau du puits, les accrochaient à son vélo et repartait pour une destination lointaine.  Arpentant les routes non bitumées du village, ces quatre personnes, bien que différentes, avaient toutes une raison primordiale de s’approprier la bicyclette. L’enjeu était vital pour elles. Ce qui relevait d’une activité de loisir pour moi ne l’était pas pour ces quatre personnes susmentionnées. Le vélo pour eux, c’était un moyen de transport, à l’instar de la voiture. Par ce moyen, elles accomplissaient quelque chose d’une envergure importante. Elles survivaient à la vie.

Des vies humaines dépendent sans doute chacune de l’usage de la bicyclette comme moyen de transport. L’enjeu est même pécuniaire pour certains propriétaires de vélo, qui s’octroient le luxe de le transformer en vélo-taxi. C’est le cas dans les grandes villes guinéennes comme Kankan, Nzérékoré ou Macenta. Il s’agit de transporter une personne ou des marchandises d’une place à une autre, d’un marché à un autre ou d’un village à un autre. Toutefois, même si le vélo est considéré depuis Mathusalem comme moyen de locomotion pratique et abordable pour les habitants des zones rurales, on assiste depuis une dizaine d’années à leur obsolescence. Les vélos-taxis disparaissent lentement pour laisser la place aux taxis-motos. Avec ces derniers, on est loin du côté écologique latent du vélo, les taxi-motos contribuent largement à la pollution contrairement au vélo, qui a longtemps été considéré comme un transport doux, préservant l’environnement.

Pour finir, je pense qu’il nous faut tous, et sans exception, connaître une expérience à vélo. Pour certains adolescents, le vélo devient de plus en plus ringard et délaissé, au profit de nouveaux loisirs. Chez moi, les plus petits qui n’ont pas connu « les années Gatsby » du vélo tentent de connaître ce charme suranné du vélo. Avec eux, j’ai la vague impression que le vélo a encore de beaux jours devant lui.